La physic porn de Greg Egan

Un roman de SF doit-il être scientifiquement plausible pour être intéressant ? A en croire la bonne santé du secteur, il semblerait que non et si beaucoup de récits  comportent des extrapolations d’un savoir technique et scientifique éprouvés, ceux-ci se trouvent toujours dépassés par l’imaginaire.

Hard SF et plausibilité scientifique

Les romans et nouvelles de Egan (surtout les romans) consistent à transposer de façon la plus détaillée possible des théories scientifiques existantes en changeant les prémisses et/ou en déduisant à partir de ces théories des phénomènes possibles. La dimension hard SF réside essentiellement dans la précision du détail, laissant au lecteur l’impression que « cela va de soit ».

Le point de départ de la trilogie Orthogonal (2011-2013 – non traduite) est un trope SF – sauver une planète – à cette différence que la métrique de Minkowski y est remplacée par la métrique de Riemann. Imaginez que le héros d’Interstellar vieillisse beaucoup plus vite que sa fille restée sur Terre, de manière à ce qu’une année pour elle soit plusieurs années pour lui, et bien il aurait eu beaucoup plus de temps pour sauver l’humanité, au lieu de crever comme un con dans un trou de ver et de laisser ses frères humains se démerder avec leur Ventolin. Egan, lui, tire les conséquences ultimes de cette prémisse, avec un luxe de détails, formules et diagrammes à l’appui, tout à fait spectaculaires.

Le souci du réalisme est tel que quand il se plante de monture, Egan s’en excuse  On peut lire par exemple sur son blog la mention suivante à propos de son roman Quarantaine, publié en 1992:

« J’espère que les autres aspects du roman sont toujours dignes d’intérêt, et que même les exploits quantiques impossibles sont divertissants. Mais il est important de comprendre la réalité de la mécanique quantique et, bien que nous soyons encore loin de la saisir dans son intégralité, Quarantaine s’éloigne définitivement de trop de choses parmi celles que nous savons être vraies. »

L’intrigue de Quarantaine s’appuie sur un élément essentiel de la mécanique, à savoir la réduction du paquet d’onde.

La théorie quantique a été créée pour décrire le comportement des phénomènes microscopiques tel qu’il ressortait des observations. Pour obtenir des informations sur un système à l’échelle subatomique, il faut pouvoir établir des corrélations strictes entre les états du système microscopique et ceux des appareils de mesure, lesquels sont perçus directement. Mais problème: l’interaction (appelée « observation ») entre le niveau macroscopique et le niveau microscopique semble pervertir ce dernier.

Pour schématiser, à une particule est associée une fonction d’onde (équation de Schrödinger) reliée à la probabilité de sa présence dans un espace donné. Or la fonction d’onde, après l’opération de mesure par un dispositif macroscopique, disparaît, comme si l’état de la particule se réduisait à celui mesuré par l’appareil. La décohérence quantique exprime cette disparition de la réalité quantique qui, du point de vue ontologique, n’est pas un état donné mais une superposition d’états (le chat mort et vivant). De cette superposition d’états propre au niveau micro, il ne reste, au niveau macro, qu’un état déterminé réifiable immédiatement avec 100% d’efficacité. Mais la décohérence est-elle vraiment un phénomène objectif, un phénomène dont la réalité ne dépend ni de l’observateur, ni de l’instrument de mesure ?

Dans Quarantaine, Egan reprend l’hypothèse de von Neumann et Wigner qui ne font que déplacer le problème du clivage entre niveau macro et niveau micro en le situant entre les processus physiques et la conscience. Mais la physique est-elle à même de définir la conscience ? En dépit des efforts louables du grand Greg, dans l’état actuel de la recherche, la conscience et le physicalisme, c’est comme le diadème et le bonnet, faut choisir.

Mais pourrait-on reprocher à Egan d’utiliser une hypothèse scientifique non fiable à des fins artistiques ? Lui a l’air de le penser. Et le fait qu’il ait besoin de se justifier sur toute une page alors même qu’il s’agit d’une fiction montre, d’une part qu’il est parfaitement conscient de ce sur quoi repose sa réputation et de la place accordée au crédit scientifique dans ses romans… à croire qu’il n’y aurait rien d’autre à voir !

Et c’est bien la question.

Tais-toi et calcule ah bon ?

S’il admet que Quarantaine s’appuie sur une mauvaise interprétation de la physique quantique, il n’empêche que cette interprétation fait partie du stock d’hypothèses scientifiques reconnues, faisant l’objet de débats au sein de l’institution. Qu’elles puissent être définitivement abandonnées ou jugées peu consensuelles par la communauté n’en fait pas pour autant des objets fictionnels.

On est alors tenté de lui répondre Mais qu’est-ce que ça peut nous foutre !? Le cycle de Fondation d’Asimov a-t-il besoin de s’appuyer sur des théories scientifiques existantes ou faire des inférences scientifiquement plausibles pour être digne d’intérêt ? Sans doute que non. Le Cycle de fondation est une expérience de pensée obéissant à plusieurs types de règles sous-jacentes, qu’elles soient physiques, psychologiques, biologiques, social, etc. Et si ça fonctionne d’un côté, ça peut fortement pêcher de l’autre. Sur le plan économique par exemple, le problème sous-jacent de l’exploitation des minerais nécessaires à la construction des nombreuses entités technologiques qu’on peut y trouver n’est que rarement considéré comme un problème pertinent. Mais quelqu’un qui serait par exemple tatillon sur sa faisabilité budgétaire et jugerait de la vraisemblance de l’ensemble sur cette base aurait certainement du mal à s’immerger dans un roman de SF si on pense au gouffre financier que représente la majorité des gadgets qu’on y trouve.

Plus sérieux est le problème du dualisme corps-esprit qu’Egan ne parvient pas vraiment à dépasser, fidèle en cela au crédo du transhumanisme. J’y reviendrai dans un prochain post.

Autre roman de Egan, Schild’s Ladder (2002) que l’épaule d’Orion présente de la façon suivante:

« Pour appréhender Schild’s Ladder, il faut un doctorat en physique. Il faut connaître la théorie de la gravitation quantique à boucles version Carlo Rovelli et Lee Smolin, il faut savoir ce qu’est la décohérence quantique de Heinz-Dieter Zeh, savoir ce qu’est un vecteur d’état, un espace de Hilbert, la géométrie différentielle et la métrique riemanienne, l’invariance de Lorentz….Et il est impossible de s’en passer car c’est le sujet même du roman. »

Voilà.

Le coût (élevé) de la Hard SF

La hard SF s’expose au même risque qu’un dessin réaliste: plus un dessin est plausible, plus les erreurs sont visibles; un bras légèrement trop long ou une section musculaire incohérente, un problème de proportion et on jugera le dessin raté. (Ou pas… Ça fait partie des grands mystères de la perception humaine: comment des formes aussi familières, celles de notre corps dans l’espace, peuvent-elles faire l’objet d’erreurs aussi grossières, aussi bien du côté de celui qui fait que de celui qui voit ?) Sans pouvoir totalement s’en affranchir, un caricaturiste est plus libre dans sa représentation en se permettant tout un tas d’écarts acceptables considérés comme faisant partie de son style.

On se fiche donc royalement de la crédibilité scientifique du Cycle de Fondation, car là n’est pas dans l’intention de l’auteur; en revanche, on peut imaginer qu’un chercheur en physique des particules lira de la hard SF avec un crayon rouge à la main. Bref, la rigueur est un risque pour ceux qui, nombreux, redoutent la critique.

Ce qui revient à dire qu’un roman de Egan (comme de Robert L. Forward ou de Liu Cixin ou d’Alastair Reynolds) n’a pas vraiment le droit à l’erreur car l’investissement intellectuel est tel que la patience du lecteur n’y survivrait pas. Car pourquoi se faire chier à lire des trucs aussi ardus si c’est inventé ? L’acceptation, pour ne pas dire la complaisance, du lecteur à l’égard de ce type de roman repose à mon sens sur le mérite de l’auteur lui-même qui, en se soumettant aux exigences de la règle scientifique, aura fait preuve d’une égale abnégation. Un auteur qui aurait tout imaginé n’aurait certainement pas pu exiger autant de son lectorat.

On me répondra que beaucoup de lecteurs étaient ado quand ils ont lu Egan ou Forward, qu’ils ignoraient tout des théories impliquées, bref ils n’y comprenaient strictement rien, l’histoire suffisant amplement à leur plaisir.

The Guru Effect

Cette hypothèse me paraît foireuse car elle revient à dire qu’on aimerait la hard SF en dépit de ce qui fait sa substance même. Et l’excitation provoquée par l’histoire et les personnages compenserait finalement l’incompréhension. Je pense au contraire que pour beaucoup de gens, ne pas comprendre concourt de façon essentielle au plaisir.

C’est un phénomène bien connu de la psychologie cognitive que Dan Sperber a appelé the Gurru effect (2010): le fait de ne rien y comprendre, au lieu de décourager le lecteur ajoute à son intérêt, devenant même son motif exclusif.

Je ne retiens toutefois qu’une partie des arguments du Guru effect puisque la cible de Sperber n’est pas la science mais l’imposture intellectuelle – la branlette post-moderne, la psychanalyse lacanienne, Foucault et la French theory, Zizek, et aujourd’hui Jordan Peterson, ce mélange de platitudes, de concepts ronflants, le plus souvent faits maison, et de métaphores, un margouillis qui « fait » savant au prétexte qu’il est obscur et favorise irrémédiablement les biais de confirmation (je crois ce qui m’arrange). Or ce n’est pas parce que la science est absconse que tout ce qui est abscons est sérieux, ce peut être tout simplement un chapelet de conneries !

 Cependant, un discours tout à fait sérieux, bien qu’il s’adresse à des gens différents peut avoir un effet similaire, pour autant que ce discours dépasse largement leur niveau de compréhension.

La grande différence entre Peterson et Egan c’est que le premier, parce qu’il est embrouillé et évasif échappe à toute critique: on ne sait pas par laquelle commencer et si on se hasarde à lui en faire une, il pourra toujours dire qu’on l’a mal interprété. C’est la force du flou. Et sa lâcheté.   

Ce mécanisme s’enracine malgré tout dans un processus normal d’apprentissage. La charité interprétative s’apprend très tôt: quand on vous disait quand vous étiez petit que l’être humain est composé à 60% d’eau, vous aviez le choix entre vous dire: « elle déraille complet la maîtresse. Sinon, pourquoi on s’envole pas quand il fait chaud hein ! » ou « elle dit quelque chose de vrai mais que je n’arrive pas à me représenter… »

L’essentiel est que la source soit considérée comme une autorité. « La difficulté même de saisir cette idée, dit Sperber, [nous] indique qu’il s’agit d’un élément d’information pertinent, qu’il vaut la peine de s’en souvenir et d’y réfléchir jusqu’à ce [que nous puissions] y voir plus clair. »

De là à penser que tout ce qui est mystérieux est pertinent, il n’y a qu’un pas de roitelet: « Étant donné que, pour les fidèles, la pertinence de la croyance ne fait aucun doute, son caractère mystérieux même est une forte indication de son importance. L’impénétrabilité indique la profondeur. »

Le charlatanisme culturel et la sophistication des concepts scientifiques peuvent ainsi conduire au même type de réaction chez le lecteur/auditeur, mais avec 2 différences majeures: les seconds possèdent une valeur de vérité qui fait défaut au premier et il est possible de les maîtriser un jour, moyennant patience et travail, alors que pour le premier, il n’y a précisément rien à comprendre.

La hard SF gagne ainsi sur les deux tableaux: aux lecteurs savants, elle séduira par la façon ingénieuse dont elle utilise la science, telle une véritable prospective ; aux profanes, elle aura le charme vénéneux d’un évangile mystérieux, un peu comme Indiana Jones devant des tablettes gravées.

Bref, tout le monde y gagne… à part ceux que la cosmologie, la métaphysique et la physique théorique n’intéressent vraiment, vraiment, mais alors vraiment pas, et ça fait du monde, il faut admettre.

Référence:

Dan Sperber, The Gurru Effect, Review of Philosophy and Psychology volume 1, pp. 583–592 (2010).

Le cabinet des curiosités: avant Trajectoire de Ken Liu

Dans la nouvelle Trajectoire de Ken Liu (La Ménagerie de papier, ed. Le Bélial, 2015), Léna Auzenne, devenue plus que centenaire – et mortelle après réflexion- raconte comment elle a été initiée à la plastination des corps au sein de la société BodyWerk.

« La plastination débute par l’embaumement pour arrêter la putréfaction. Puis on dissèque le corps, on décolle peau et graisse pour révéler l’anatomie sous-jacente , et on trempe dans des bains successifs d’alcool et d’acétone jusqu’à ce que celle-ci remplace l’eau et la graisse des tissus. On le plonge dans un bain de polymère et on crée le vide autour de lui. L’acétone à l’intérieur des tissus commence à bouillir dans le vide et, en s’évaporant, attire les polymères liquides dans les muscles, les vaisseaux, les nerfs. En fin de compte, le plastique imprègne chaque cellule.

Ce processus s’appelle d’ailleurs « l’imprégnation »

Le corps, désormais prêt pour la mise en scène, est durci dans l’application de chaleur ou de gaz, jusqu’à ce que les chaînes de polymères soient liées et pétrifiées. A cette époque du processus, le corps est devenu une sculpture de plastique, et chaque capillaire et fibre musculaire a été conservé. » (p.148).

La polémique

On se souvient de l’exposition itinérante Our Body, à corps ouvert qui mettait en scène 17  écorchés et « pièces anatomiques » de Chinois. Organisée par la société hongkongaise Encore Events, les corps avaient été présentés à l’Espace 12 en février 2010, boulevard de la Madeleine à Paris. Elle fut interrompue après deux mois de succès par la décision du juge des référés au tribunal de grande instance de Paris, suite à la plainte de deux associations, Ensemble contre la peine de mort et Solidarité Chine qui mettaient en doute l’origine déclarée des corps.

Mais ce n’est pas ce qui motiva la décision judiciaire (au reste, comment le prouver ?) mais la notion de décence, cad une affaire de convenance.

Outre l’interruption sous 24h de l’exposition, le juge exigeait que la dite société « qu’elle fasse dresser la liste des sujets exposés par un huissier de justice dans les mêmes délais, et qu’elle les séquestre, afin de pouvoir les présenter aux autorités françaises compétentes, sur leur demande. Sous peine d’une astreinte supplémentaire de 50 000 euros par infraction constatée. » Dixit Le Monde.

Ni le Palais de la découverte, ni le Musée de l’homme, ni la Cité des sciences n’avaient accepté d’abriter l’expo.

Comme le rappelle quotidien, ce genre d’exposition est très populaire: créée au Japon en 1995, elle était passée par New York puis Lyon en mai 2008 (100 000 visiteurs) puis Paris (120 000 visiteurs en deux mois, à 15,50 euros plein tarif)

De nombreuses expositions de ce genre sont organisées chaque année, en Europe, aux Etats-Unis et en Asie (ce fut d’ailleurs l’argument du gérant de l’exposition en France, Pascal Bernardin).

Les 200 spécimens humains de l’exposition The  Body  Worlds  and  the  Story  of  the  Heart à l’Ontario Science Centre de Toronto en 2009 avaient attiré 100 000 visiteurs, dont un tiers de scolaires, après 57 jours d’expo.

On pouvait y voir les écorchés skier, faire du skate, jouer au hockey… Bref, bonne ambiance !

Plus récemment, le 21 avril dernier, à Zagreb, était inaugurée Human Body 2.0 enormous universe within  – 15 écorchés et plus 200 organes « de la fécondation au foetus, de la petite enfance à l’enfance, de l’adolescence à la jeunesse, de l’âge adulte à la vieillesse. »

La fiction… et la réalité

La plastination fut inventée en 1977 par l’anatomiste allemand, né en 1945, Gunther Von Hagens, fondateur de la société  Gubener Plastinate GmbH à Guben en Allemagne.

On nous dit, par exemple que  » Le Dr Gunther von Hagens a créé le premier centre de plastination anatomique du monde, qui offre un environnement idéal pour l’éducation et le développement. L’installation comprend une exposition permanente de plastinats anatomiques – le PLASTINARIUM – issus des laboratoires, ainsi qu’une zone de démonstration et de visualisation. »

Le crédo du cher Gunther, tout droit sorti d’une nouvelle de Ken Liu, n’aurait pas déplu à Léna Auzenne:

« [L’anatomiste] est obligé, de part son travail quotidien, à rejeter les tabous et les convictions que les gens ont sur la mort et les morts. Je ne suis pas moi-même controversé, mais mes expositions le sont, car je demande aux spectateurs de transcender leurs croyances et convictions fondamentales sur notre inéluctable destin commun.

J’espère que les expositions seront des lieux d’illumination et de contemplation, voire de connaissance de soi philosophique et religieuse, et qu’elles seront ouvertes à l’interprétation, quels que soient le milieu et la philosophie du spectateur. » »

Le droit et la morale: vous avez 4 heures !

Pour le juge des référés dont les conclusions avaient mis fin à l’exposition parisienne, point d’illumination ou de contemplation. A la lumière de l’évolution récente de la législation funéraire (loi n° 2008-1350 du 19 déc. 2008, AJDA 2009. 531 ), « la loi, d’ordre public, […] prohibe les conventions ayant pour effet de marchandiser le corps [et elle] ne prend pas en compte l’utilisation des cadavres dans un but de formation ou d’information du public ».

En outre, le juge précise « que l’espace assigné par la loi au cadavre est celui du cimetière, que la commercialisation des corps par leur exposition porte une atteinte manifeste au respect qui leur est dû. »

Les apprentis juristes connaissent les liens complexes et sans cesse renouvelés entre droit et morale. Ce n’est pas moi qui m’y collerais, aussi passionnant soit le thème.  Là où, à mon sens, les conclusions coincent c’est concernant ce passage:

« (…) qu’il ne peut être revendiqué l’insertion de la manifestation dans un courant artistique ancien et constant : le transi, l’écorché, la leçon d’anatomie… alors que l’exposition épuise le mouvement artistique dans lequel elle prétend se situer en substituant à la représentation de la chose, la chose même. »

Mais un  cadavre qui skie ou qui fait du hockey est-il encore un cadavre ? N’est-il pas, déjà, une représentation ?

Cadavres exquis

Peut-être en effet aurait-il fallu élargir le spectre du courant très ancien et très varié du spectacle anatomique. Et en la matière, le sujet est vaste:

Protégé des Médicis, l’anatomiste sicilien Gaetano Giulio Zumbo (1656 ?-1701), précurseur de la céroplastie et le chirurgien français Guillaume Desnoues (1650-1735) offrent des modèles artificiels d’un réalisme inouï connus dans toute l’Europe et qui furent largement exposés, en Italie, en Allemagne, en France, au Danemark et en Angleterre. Pas sûr que les visiteurs fascinés n’y voyaient que matière à s’informer. Car les pièces sont d’une indiscutable beauté, c’est un fait.

Citons aussi le médecin français Philippe Curtius (1737-1794), qui abandonna sa carrière médicale pour ouvrir deux lieux à Paris, le Salon de Cire, en 1776 et la Caverne des Grands voleurs, boulevard du Temple, en 1782. Tous deux étaient bien sûr destinés au divertissement populaire, comme le sera plus tard  le musée Tussaud, en France et en Angleterre.

On me rétorquera que c’est de la cire et pas de la chaire humaine plastinée !

Certes…

Efisio Marini, minéralisateur des corps

Le médecin naturaliste Efisio Marini (Cagliari 1835 – Naples 1900), surnommé « le pétrificateur » pour sa méthode de momification des cadavres permettant de leur redonner couleurs et consistance.

Snobé par les universitaires et subissant l’hostilité d’un public encore très superstitieux, il quittera Cagliari et s’installera à Naples où il deviendra célèbre, en grande partie grâce à un public non scientifique. Son intervention à l’Exposition Universelle de Paris en 1867, séduira Napoléon III à qui il offrira sa pièce sans doute la plus célèbre… une table en chair humaine !

La même année, la célèbre revue The Lancet lui offrira la consécration en consacrant un papier à ses travaux.

La dédicace figure sur une plaque d’argent, accrochée à un pied humain, qui indique :

« Table composée de différentes substances animales réduites à l’état de pierre par le docteur Efisio Marini dédié à S. M. l’Empereur […] ».

Frise de trèfles formée de cervelle humaine, supportant un pied avec la dédicace à Napoléon, tandis que tout autour, artistiquement disposés, se succèdent quatre ellipsoïdes de bile humaine et de bile animale, portant les différentes nuances de vert. écrit l’impeccable blogger de la Porte ouverte.

Nétalon, médecin de Napoléon III et membre de l’Académie de médecine, fut chargé par ce dernier d’examiner les pièces soumises par Marini et s’y montra favorable:

« Ce même pied, examiné le 26 février, a repris sa souplesse assez complètement pour que j’aie pu disséquer assez facilement le muscle abducteur du cinquième orteil. NÉLATON. »

Toutefois, Marini, échaudé par le dédain des milieux scientifiques italiens qui persistaient à lui refuser un poste, ne révéla jamais sa méthode.

L’écrivain anglais, Thomas Adolphus Trollope parle ainsi dans ses Mémoires, publiés en 1889, de la fameuse table:

« Nous avons vu une table très belle et très polie, de couleurs variées, faite de différentes portions de chair humaine. […] Je suppose, mais je ne sais pas, que le coût du procédé serait considérablement plus élevé que celui de la crémation, ou des sommes habituellement dépensées pour nos obsèques. Mais si ce n’était pas le cas, ou si les dépenses pouvaient être inférieures à ces dernières, la découverte du Signor Marini ouvrirait à l’imagination des perspectives des plus surprenantes. Que se passerait-il si nous pouvions transformer ainsi en marbre tous mes descendants ? Comment vivrions-nous dans un monde peuplé de statues de marbre dépassant infiniment en nombre ses habitants vivants ? »

Aussi glorieuse que fut sa réputation, le savant mourût dans la misère. En février 2006, Corrado Zedda et Luigi Serra, auteurs d’un site dédié à Marini, ainsi que d’une BD, avec l’aide du docteur Antonio Maccioni, chef du département d’anatomie pathologique de l’hôpital Santissima Trinità de Cagliari, firent exhumer le corps pétrifié de l’historien Pietro Martini.

Malheureusement, tout le monde n’a pas le talent de Léna Auzenne et le corps de l’illustre homme pétrifié fut perdu à jamais.

Comparé aux ambitions de Marini qui désirait conserver dans la mort l’apparence des vivants et ce indéfiniment, la thanatopraxie moderne est plus modeste car elle ne vise qu’une conservation temporaire, pour l’exposition du défunt dans un environnement exclusivement intime. Elle a pour base chimique le méthanal ou formaldéhyde. Elaboré en 1867, c’est un gaz présent dans les chaudières industrielles, les centrales thermiques ou les pots d’échappement.

Empailler Médor

Le 9 novembre prochain sera proposé sur le site de ventes INTERENCHERES, un magnifique Golden Retriever découpé en 92 tranches, « lesquelles, nous dit-on, se feuillettent comme un livre. Toutes les parties sont amovibles et sont crochetées à une structure métallique laquée noire. »

La présentation dit ceci:

HISTOIRE NATURELLE COLLECTION LUCIEN MONIN COLLECTION JOSEPH VÉDRINE COLLECTION IB BØNNELYCKE ET À DIVERS

Lot n°221

Estimation : 2 500 – 3 000 € 

Hauteur : 71 cm, largeur : 1,20 m. Canis lupus familiaris. Travail des années 1970. Extrêmement rare. Étiquette : Naturwissenschaft Lehrmittel Intitut, Diekmann (Établissement à Detmold, spécialisé dans la préparation, la plastination et la restauration anatomiques, zoologiques et géologiques)

Rappelons que l »artiste » entrepreneur Damien Hirst avait en 1991, alors en pleine gloire (celle des artistes contemporains étant très courte), refilé au galeriste Charles Saatchi, et la demande de ce dernier, un requin formolé pour la somme de 6000 livres, lequel galeriste l’avait revendu 50 000.

Le truc ayant pourri quand même (tout le monde ne s’appelle pas Efisio Marini), Hirst en proposa un autre en 2006. Neuf.

C’est ainsi qu’on passa en un siècle et demi à une table faite de chair humaine réalisée par un artiste maudit et oublié à un requin empaillé refourgué 50 000 boules par un escroc.

On a les artistes qu’on mérite.

Références

Vidor, G. M. (2010). Andro-lithe et pétrification des cadavres humains au XIXe siècle. Frontières, 23(1), 66–73.

Efisio Marini et la survivance du corps, dans (l’excellent) BLOG https://laporteouverte.me

Erminia Pedretti, « The Medium is the Message: Unravelling Visitors’ Views of Body Worlds and the Story of the Heart », Understanding Interactions at Science Centers and Musesum, pp.45-61.

Laurence Talairach-Vielmas, « Anatomical Models: A History of Disappearance ? », Printemps, n°5, 2014.

Le pouvoir « what if » de la SF

Les fake news, c’est bien connu, sont une plaie, une tumeur bubonique qui menace individus et institutions et dit-on jusqu’à la démocratie. Elles ne représentent toutefois qu’une infime partie de ce qui est partagé sur la toile; la plupart des utilisateurs des réseaux sociaux croient encore aux « grands médias » (même si ces derniers ne le méritent pas toujours) qu’ils considèrent comme une source fiable de connaissances.

Qu’est-ce qui nous pousse à partager une information ? A priori, parce qu’on la croit vraie. Mais est-ce toujours le cas ? La diffusion d’informations dépend-elle uniquement de notre intérêt pour la vérité ?

À en croire l’étude de Sacha Altay, Emma de Araujo et Hugo Mercier, If this account is true, it is most enormously wonderful”: Interestingness-if-true and the sharing of true and false news, la vérité, si elle est largement privilégiée, ne fait pas nécessairement partie des critères de pertinence d’une information. Une information, « si elle est vraie », c’est à dire dont on n’est pas trop sûr, peut être assez tentante pour qu’on se dispense de cette sainte prudence qu’on dit fille de la sagesse.

Pourquoi s’en priver ! Si elle est fausse et bien on l’oubliera vite et si elle est vraie alors on pourra s’ennorguillir d’avoir été l’un des premiers à épater la toile et de se voir gratifier de followers supplémentaires (là étant pour beaucoup d’entre nous l’unique raison de se lever le matin). Bref, rien n’a perdre. Que Bill Gates ait voulu nous refiler la 5G à l’aide d’un fielleux grain de riz sous-cutané introduit par des toubibs aux ordres, c’est quand même plus excitant qu’un banal accord commercial entre États, collectivités locales et opérateurs !

Ce qui revient à dire que la fiction fait partie intégrante de notre rapport (épistémique) au monde, y compris (surtout) sous ses aspects les plus triviaux. Le monde se doit d’être un spectacle permanent et s’il résiste – il résiste souvent – alors il faut l’y aider. Une information qui galvanise, même si elle a de bonnes chances d’être fausse, est quand même beaucoup plus intéressante qu’une banale vérité avérée.

Du reste, une bonne partie de l’activité scientifique dans son ensemble consiste à confirmer par l’expérience empirique nos intuitions. Mine de rien, c’est un boulot difficile et on ne peut plus noble, mais il se trouvera toujours des crétins pour vous dire: « Ah ouai d’accord, tout ça pour ça ! » En oubliant que le géocentrisme fut longtemps affaire d’intuition.

Une information « what if » – intéressante si elle était vraie – est une vérité potentielle à laquelle est conditionné un gain, un gain émotionnel et étant donné l’importance sociale que revêtent les réseaux sociaux dans certains secteurs d’activités qui en dépendent étroitement, un gain matériel et symbolique.

Il en va de même pour la vérité fictionnelle. Vecteur d’une expérience de pensée, une situation fictionnelle est aussi un pari sur le réel. C’est une situation contrefactuelle dont la vérité suppose que des conditions soient remplies (nomologiques, temporelles notamment), ces conditions étant plus ou moins vraisemblables selon le contexte qui est le sien.

Je ne pense pas prendre beaucoup de risque en disant que parmi tous les futurs possibles, un futur tel que Dune ou n’importe quel roman de SF, même dans un horizon temporel suffisamment long, est peu probable, ses conditions de possibilité étant elles-mêmes assez peu vraisemblables.

On peut parler d’impossibilité contingente (par opposition à une impossibilité absolue). Etant donné les moyens qui sont les nôtres (nos ressources naturelles, nos capacités cognitives) et nos connaissances acquises sur les lois physiques, il est peu probable que nous parvenions un jour à des modes de communication pareils à ceux communément représentés dans la SF, sans considérer pour autant que cela soit nécessairement impossible comme il est impossible de diviser équitablement 23 en 3. Il ne peut y avoir de trisection de 23, cela est épistémologiquement impossible.

En revanche, les scénarii de SF sont des possibilités métaphysiques. L’imagination en est le vecteur cognitif majeur. Nous ne raisonnons pas uniquement sur des faits, mais de façon essentielle, sur des modalités, sur des situations possibles et/ou nécessaires: j’aurais dû faire ça, je pourrais ne pas faire ça, il n’est pas nécessaire de faire ça, il se pourrait que ça arrive, ça aurait pu arriver, etc. Ainsi, les lois de la nature auraient pu être différentes de ce qu’elles sont et ce n’est pas la moindre des vertus de la science fiction (au sens large) de nous le rappeler.

La littérature de science fiction témoigne d’une passion proprement humaine, celui du raisonnement modal et de façon plus générale les conditionnels contrefactuels: « qu’est-ce qui se passerait si… ? »

Greg Egan (en particulier dans Diaspora) est certainement l’auteur ayant poussé le plus loin  ce « what if » inhérent à la conscience humaine, sur l’identité personnelle, le problème corps-esprit, le réductionnisme physicaliste, le réalisme scientifique…, dans une démarche prospective la plus rigoureuse qui soit et à ce jour inégalée.

*** Illustration: Diaspora (1997), Greg Egan, éditions Le Belial – Couverture: Aurélien Police – Traduction: Francis Lustman.

Le conte de fées est-il encodé génétiquement ?

Une histoire imaginaire se transmet-elle comme un patrimoine génétique ? Peut-on retracer l’origine d’un scénario comme le fait la biologie évolutionniste avec l’origine d’un gène ?

C’est en tous cas ce qu’ont fait des chercheurs Sara Graça da Silva et Jamie Tehrani, reprenant l’hypothèse des frères Grimm selon laquelle la forte ressemblance de famille des contes populaires indo-européens ne serait pas due au hasard (pour ceux et celles d’entre vous qui seraient passés à côté de cette histoire dont la publication date de 2016….)

Dans le contexte troublé des guerres napoléonniennes, les Gebrüder Grimm avaient constitué la base de données la plus importante au monde en matière d’imaginaire folklorique, cherchant les ressources spirituelles et idéologiques, qu’ils pensaient dissimulées dans le récit populaire, de l' »âme germanique ».

En utilisant différentes PCM propres à la biologie évolutionniste, Tehrani et da Silva font remonter  certains contes à plusieurs milliers d’années en établissant une corrélation entre la distribution géographique de certaines contes populaires, tels certains caractères biologiques, et des liens de parenté entre les populations et leur évolution, un peu comme on étudierait un transfert horizontal de gène à travers un arbre phylogénétique.

La Belle et la Bête par exemple aurait plus de 3000 ans, l’histoire du gars qui vole un ogre dont les variations sont connues (Le Seigneur des Anneaux, entre autres) aurait 4500 ans. Quant au mythe de Faust, il aurait, au pifomètre, 6000 ans.

Vous me direz, bah et alors ? Les premiers contes de fées occidentaux datent d’Esope et ils auraient… 6000 ans ! Cela dit, l’existence de ce dernier qui aurait été esclave est peut-être tout aussi fictive que les fables qu’on lui attribue, mais peu importe si les fables, elles, existent bien.

L’intérêt de la méthode scientifique ici concerne moins l’ancienneté en elle-même que ce dont elle est l’instrument, à savoir l’étroite parenté entre les structures narratives et les thèmes abordés en dépit d’un contexte culturel extrêmement éclectique, laissant présumer qu’il y aurait dans ce phénomène transculturel des constantes cognitives sui generis, par delà le temps et l’espace.

L’auteur de SF français est-il une contradiction en soi ?

– Depuis Jules Verne, il s’est passé quoi dans l’Imaginaire français ? 

– Bernard Werber ! 

Le genre de truc que j’ai parfois (souvent ?) entendu, lu, blogger, éditeur, sur la question de la SF « à la française ».

Mais avant de parler d’Imaginaire français, il faudrait déjà parler d’Imaginaire en France. 

Comme le rappelait fort justement Stéphane Marsan, éditeur de  Braglonne, ce dernier reste largement sous-représenté en librairie alors qu’il représente 7% des parts de marché de la fiction, avec 50 millions d’euros de CA. Scandaleux.

Les raisons sont évidemment multiples. Certains invoquent la prédominance du style sur le fond et la persistance du modèle de la littérature blanche, l’un servant de béquille à l’autre. Obnubilés par le « grand style », vecteur de capital social entre tous, les romanciers français plongeraient le lecteur, avide d’action et d’inventivité scénaristique, dans des abîmes d’ennui (cette raison est à mon sens totalement foireuse mais j’y reviendrai).

Les romanciers français manquent d’imagination, admettons. Mais on pourrait invoquer aussi la paresse et le conformisme déplorables de l’édition française à l’endroit de la culture scientifique (et je ne parle pas uniquement de ses conséquences sur le roman de Hard science), des presses universitaires et autres, et de façon générale du milieu intellectuel, si tant est que cette expression veuille encore dire quelque chose. Sur la chose scientifique, y prospèrent d’innommables conneries et depuis des décennies, Bruno Latour ayant été particulièrement prolixe en la matière et pas le moins connu des scientophobes institutionnalisés. L’un de ses émules m’avait dit un jour que la mer Egée n’existait pas avant qu’on lui ait donné un nom… En tous cas, les crétins n’ont nul besoin qu’on le leur dise pour en être, celui-là était bon, et l’évidence avec laquelle cette réalité s’était alors imposée à moi aurait tapé un cortex bien avant l’invention du langage.

De façon corrélative, la philosophie analytique, affiliée à la logique et à l’épistémologie, s’y porte très mal, beaucoup plus mal que la SF, car elle on ne la traduit même pas.

Votre serviteur fut lui-même plusieurs fois qualifié de nazi pour avoir tenté d’expliquer la façon dont les neurosciences renouvelaient le champ disciplinaire des sciences humaines et sociales. La question des priorités budgétaires, la guerre de territoire entre ce qu’on appelait jadis les « humanités » et la science dite « dure »,  n’y est pas étranger. Quant à la paresse intellectuelle, non…Quoi ! Quelle idée !

Le niveau de la science grand public (suffit de lire quelques productions Odile Jacob) est effroyablement bat. A croire que le lecteur est le dernier des cons. Dans un certain imaginaire éditoriale, il l’est. L’est-il ? On se le demande.

Si les principaux acteurs de la diffusion du savoir traitent si mal la recherche technologique et scientifique, pourquoi le grand public lui accorderait-il de l’importance ? Rappelons que la fumisterie psychanalytique y a oeuvré plus que de raison, jusque dans les écoles de médecine et les tribunaux, et c’est toujours le cas. Son influence en France a été considérable, pourtant inversement proportionnelle à son efficacité. Après le non respect du principe de non contradiction en physique des particules, la mainmise de cette caste de rebouteux crypto-mystiques sur deux institutions françaises majeures que sont la santé et la justice est un mystère que la science n’a pas fini de creuser ! Et les dégâts sont énormes, à plus d’un titre.

Ajoutons que Science et Vie a mis la clé sous la porte et que le journalisme scientifique est un pieux souvenir. En France, la diffusion grand public de la science et de la vie scientifique se cantonne à une rubrique du Monde où elle est essentiellement destinée à animer les cocktails d’entreprise de l’abonné cadre sup. Aux Etats-Unis, si la limite du pire en matière de scientophobie et de bullshit a été franchie depuis longtemps, c’est aussi là que le secteur est prospère et où se déploie des milliers de blogs et sites spécialisés.

La science fiction française a aussi hérité de cette histoire-là, toujours présente et plus que jamais.

Je reviens maintenant sur la question du style. Il est clair qu’on ne décrit pas un match de boxe avec des phrases d’une page au subjonctif imparfait, raconter une guerre interstellaire en haïkus, c’est pas du roman, c’est de l’art contemporain, on s’en doute. 

Mais la qualité stylistique d’un polar n’a jamais nuit à l’intensité de sa narration, les lecteurs d’Ellroy ont certainement eu comme moi l’occasion de s’en aviser. Le style, c’est le nerf de la guerre du roman, quel que soit sa catégorie. Une écriture purement fonctionnelle, sans saveur, est un frein à l’immersion. Ca équivaut à un réalisateur qui ne saurait pas où placer sa caméra. Opposer le style à l’efficacité narrative, c’est ne rien comprendre à l’affaire. Ce n’est pas le style qui est en cause, c’est le style pompier, le kitch, la flatulence et le mauvais goût, c’est dire par exemple:

Le long du petit mur de pierre court le poirier en espalier, avec cet ordonnancement symétrique des bras que vient féminiser l’oblongue matité du fruit moucheté de sable roux. 

Au cas où l’auteur de cette ridiculerie aurait honte, je ne lui ferais pas l’affront de le nommer, même si l’extrait est très facile à retrouver su le net (du reste, moi-même, j’utilise un pseudo)

Ce genre de gastro littéraire est ce que produisent, dans leur grande majorité, les têtes de gondole de la littérature blanche française actuelle. Mais ça, ce n’est pas le style, c’est juste sa négation.